video - color - mute / 10.30 min loop
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Lonely man
Video Hdv, single channel, large size projection, colour, no sound, 10’30
(artist residency USA- Philadelphia)
C’est à la faveur de la rencontre avec ceux - les animaux - qui ont la capacité de regarder l’Homme, les seuls à pouvoir lui renvoyer cette fonction de la vision
propre à l’être vivant, que surgit alors la prise de conscience d’un ouvert, positif, qui dans le même temps se referme, se replie sur lui-même, l’animal portant en lui un peu de ce que nous
redoutons, cette angoisse de l’infini. « L’au-delà du cercle nous ne le connaissons qu’à travers le regard des bêtes » ajoutait encore justement Rilke. Car sans doute y a t-il «dans l’animal un
peu de cette inquiétude qui nous emplit». Probablement est-ce aussi cet état de conscience qu’installe la perception de cette avancée de prime abord hostile, d’un cheval et de son cavalier, dans
la vidéo Lonely man. Et cependant l’effet s’apaise par le ralenti de l’image. S’approchant tous deux au bord de la caméra et de l’écran, face contre face toujours avec l’artiste qui filme et avec
le regardeur qui reçoit la charge par procuration, ces deux puissantes figures s’imposent dans un mouvement où le galop de l’animal propulse ces deux corps, ce centaure d’un temps présent, de
l’arrière à l’avant-plan de la profondeur du champ. Guidée par l’homme aussi redoutable que la bête, celle-ci fascine par la souffrance de son essoufflement. Ainsi y aurait-il dans le risque de
l’attaque, l’expression d’un épuisement, du corps et du cadre. A la faveur d’une modification du rapport de réception visuel, à travers une scène qui joue d’une dynamique d’approche moins qu’elle
ne nécessite de se laisser atteindre, la surprise frôle en effet le péril à l’endroit de la frontière fragile du visible, ce repoussoir qui place le spectateur devant une double figure esseulée
et marginalisée, celle de l’homme, aussi noble, résistant et vulnérable à la fois semble-t-il que l’animal dont il est le maître. Maître aussi d’un territoire indistinct déroulé et contraint dans
le format cinématographique d’un film de Western : sa présence évoque qu’il se joue là, en bordure d’une ville, Philadelphie, dont l’homme et sa communauté ont été relégué à la marge, une scène
d’affrontement dans laquelle l’acteur principal, cet homme noir endossant le rôle d’un cow-boy habituellement blanc dans le cinéma américain, tient la position du héros impossible d’une histoire
nationale dont il serait exclu et dont il emploie cependant les codes. Comme pour prendre sa revanche sur cette vie périphérique.
Mickael Roy
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